LA CULTURE DU ROTARY

Blog de Serge GOUTEYRON

LA CULTURE DU ROTARY - Blog de Serge GOUTEYRON

A propos de la culture de la paix

Par Serge Gouteyron

La culture du Rotary s’est construite autour de la culture professionnelle (1905), de la culture du service (1907) et de la culture de la paix (1921).

Seize années après sa création, le Rotary avait atteint sa maturité et définit sa philosophie pour le siècle (en notant toutefois une prédominance alternée de l’une ou l’autre culture).

Les éléments constitutifs de la culture de la paix au Rotary tournent autour des valeurs que nous revendiquons et des actions que nous mettons en œuvre.

Des valeurs, nous distinguons celles que prônent l’organisation : Intégrité, Camaraderie, Service, Diversité et Leadership et celles issues des comportements personnels ( le critère des 4 questions) que sont la Loyauté et l’Équité.

Quant aux actions pour la paix, il s’agit surtout des efforts individuels propres à chacun pour faire reconnaître globalement les droits de l’homme à travers l’éducation, le travail , l’eau, l’environnement , le statut de la femme et des enfants, le combat contre la corruption (pacte mondial de l’ONU).

Ou plus pragmatique, d’agir pour le développement économique et social, grâce aux axes stratégiques : eau et assainissement – l’éducation , la prévention et le traitement des maladies – la santé de la mère et de l’enfant – la faim et la pauvreté – et la résolution des conflits (plan vision).

Tout en poursuivant nos programmes historiques pour la formation et l’épanouissement des jeunes et en comptant sur leur capacité d’impulsion pour introduire le changement.

Ces valeurs, ces comportements et ces actions sont autant d’atouts pour favoriser la cohésion sociale, première étape pour la paix.

En tant qu’organisation internationale, le Rotary a contribué fortement à l’établissement de la paix entre les nations par la compréhension mutuelle et l’amitié à travers les Institutions internationales, les comités interpays, les centres du Rotary pour la paix et les manifestations internationales.

Le Rotary entretient une relation étroite presque filiale avec les Institutions internationales intergouvernementales. Pour une part, à l’origine de la création de l’UNESCO et pour une autre part acteur très présent dans la rédaction de la charte des Nations Unies.

D’ailleurs la journée du Rotary aux Nations Unies à New York est depuis longtemps un rendez-vous annuel prisé. Nous avons eu en France la même expérience il y a 2 ans avec la conférence à l’UNESCO avec la participation du Président du RI, Kalyan Banerjee : « la culture de la paix, une vision partagée ROTARY/UNESCO ». Un autre rendez-vous de même nature, depuis 2 ans à Washington dans le cadre de l’organisation des états américains.

Ceci pour dire que la mission du Rotary auprès des Institutions internationales n’est pas une simple représentation mais au contraire un lieu privilégié pour comprendre et faire avancer nos idées et à chaque fois que nous le pouvons un lieu pour engager une collaboration.

De cette même veine pour la paix et l’amitié s’est constitué en 1950 le comité France Allemagne. Il s’agissait de restaurer les relations mises à mal par les 3 guerres et envisager l’avenir avec confiance. Aujourd’hui 250 comités agissent dans le cadre de relations bilatérales directes pour la compréhension entre 2 pays.

Fort de leur histoire et de leur dynamisme, les comités peuvent s’engager aujourd’hui concrètement pour la paix à travers des « initiatives de paix » en Méditerranée, dans les Balkans ou en Afrique et ailleurs.

Lorsque le Rotary a inscrit dans ses buts « l’aide à l’avancement de la paix », il n’imaginait sans doute pas que les « centres du Rotary pour la Paix » formeraient un jour un millier de jeunes qui travailleraient ensuite pour les institutions internationales, les gouvernements, les ONG….

Cela dit, voilà un domaine où nous pouvons également agir concrètement pour la paix en fédérant autour de nous les initiatives de résolutions des conflits dans le cadre d’un groupe d’action.

La culture de la paix au Rotary fait appel au respect et au partage. Elle est très éloignée des idéologies de souveraineté ou de religions.

La culture de la paix pour le rotarien , ce sont des valeurs, un comportement et des actions propres à inspirer une éthique de vie capable et de susciter l’adhésion, instaurer la confiance internationale et changer l’ordre des choses.

Centres du Rotary pour la Paix – Vision, concept et progrès

Par Rajendra K. Saboo
Ancien président du Rotary International (1991/1992)

Je me rappelle entendre mon petit-fils, alors âgé de quatre ans, dire à sa sœur : « Faisons la paix et jouons ». Pour les enfants, la paix est si facile, sincère et pure.

Toutefois, lorsque les grands de ce monde nous parlent de la paix, ils évoquent sa complexité. Selon eux, la paix est un objectif difficile à atteindre. Chacun a ses propres motivations. Comment alors pouvons-nous expliquer cette différence ?

À l’image d’un enfant, la paix se développe avec une personnalité à facettes multiples qui présente un visage différent selon l’angle sous lequel on l’étudie. Un coup d’œil, un mot ou une phrase ne sont pas suffisants pour l’appréhender.

Il n’est alors pas surprenant que le symbole de la paix soit la colombe, un oiseau insaisissable. Si vous essayez de l’attraper, elle s’envole rapidement vers les cieux. Mais si vous placez des graines dans le creux de votre main, la colombe viendra de son propre chef. La paix peut également venir à vous… si vous tenez les graines qui lui permettront de se nourrir et de se développer. Selon moi, la paix n’est pas instinctive pour l’homme. De la préhistoire aux temps présents, la nature humaine a été égoïste ce qui s’est manifesté dans le désir de dominer les autres, d’être supérieur et d’engranger des possessions. Les compétitions peuvent démarrer dans un bon esprit, mais elles le restent rarement. L’économie de marché nous enseigne « la loi du plus fort ». Cet instinct animal est présent chez tous les êtres humains.

Toutefois, les êtres humains possèdent une caractéristique qui les distingue des animaux – la capacité de raisonner, la capacité d’acquérir la connaissance. Être conscient de la paix mène au développement, au bonheur et au progrès, et peut ainsi représenter un espoir pour l’humanité. Mais cette prise de conscience doit être le résultat d’une démarche délibérée. C’est ce à quoi je me référais lorsque je parlais de la colombe et de la possibilité de l’attirer en lui offrant des graines.

J’ai par conséquent senti que l’objectif de paix et d’entente entre les peuple du Rotary nécessitait une démarche réfléchie et délibérée visant à former au plus haut niveau des individus qui ont le potentiel de devenir des moteurs de la paix.

Past RI Presidents Rajendra K. Saboo and Kalyan Banerjee, and RI President Sakuji Tanaka during the special convocation ceremony at the IIS University in Jaipur, India, 25 March.

Ainsi, lorsque nous avons fêté le 50e anniversaire de la disparition de notre fondateur, Paul Harris, une idée a germé : la création de Centres du Rotary dans plusieurs universités et de programmes d’études des relations internationales dans un objectif de paix. Il se trouve que j’étais à l’époque le président du conseil d’administration de la Fondation Rotary. Cette idée a provoqué l’enthousiasme des administrateurs.

Toutefois, concrétiser un tel concept requérait beaucoup de travail pour en déterminer la faisabilité et élaborer une feuille de route, sans parler de planification. La décision a été prise d’aller de l’avant en commençant par une déclaration d’intention qui résume l’objet et les objectifs des Centres du Rotary :

« Les Centres du Rotary pour études internationales sur la paix et la résolution des conflits offrent à des individus engagés envers la paix et la coopération la possibilité de poursuivre des études de Master ou débouchant sur un certificat en études internationales, sciences de la paix et résolution des conflits dans une des universités où le Rotary a établi un tel programme. Grâce au partenariat conclu entre la Fondation Rotary et ces universités, des Bourses de la paix du Rotary sont octroyées tous les ans sur base concurrentielle pour étudier dans ces Centres.

Le candidat idéal aura de l’expérience, sera en milieu de carrière et démontrera un potentiel pour le leadership. Il pourra être issu de différentes professions telles que l’administration, le journalisme, les affaires, le droit, la diplomatie, etc. Outre former de futurs leaders au niveau local et international, les Centres du Rotary ont également pour mission de faire avancer la recherche, l’enseignement, la publication d’ouvrages et les connaissances dans le domaine de la paix, des conflits et de leur résolution, et de l’entente entre les peuples. »

11th Annual Rotary Center Seminar – International Christian University (ICU)

Nous avons commencé par ouvrir des Centres en partenariat avec les universités de Duke et de Caroline du Nord (États-Unis), l’Université chrétienne internationale au Japon, Sciences Po à Paris, l’Universidad del Salvador en Argentine, l’Université de Bradford en Angleterre, l’Université de Berkeley aux États-Unis et l’Université du Queensland en Australie. Pour diverses raisons, nous avons dû fermer les portes des Centres de Sciences Po, de l’Universidad Del Salvador et de Berkeley. Nous avons en parallèle ouvert un nouveau Centre à l’Université d’Uppsala en Suède. Le succès de ces programmes de deux ans nous a incités à étudier la possibilité de proposer un programme plus court destiné à des professionnels ne pouvant pas s’absenter pour une durée aussi longue. C’est ainsi qu’est né le programme de l’Université de Chulalongkorn à Bangkok.

Visites des étudiants des centres du Rotary au CETC (Chambres Extraordinaires au sein des Tribunaux Cambodgiens)

Naturellement, ces Centres coûtent cher et au moment de lancer le programme, des réserves avaient été émises quant à leur bien-fondé. Plutôt que de consacrer d’importantes sommes à un objectif lointain, ne serait-il pas plus judicieux d’allouer les ressources précieuses de la Fondation à des besoins immédiats en luttant contre la faim et la pauvreté, et en favorisant la santé et le développement humain ?

Avec une cinquantaine de boursiers participant aux programmes de master qui peut durer jusqu’à deux ans et une autre cinquantaine participant au programme court, le budget annuel peut facilement atteindre 4,65 millions de dollars. Cela représente un montant non négligeable, mais nous avons la chance de compter parmi nous des Rotariens généreux qui croient en ce programme. Aujourd’hui, les administrateurs de la Fondation ont pour objectif de le doter d’un capital de 125 millions de dollars d’ici 2015 afin de garantir sa pérennité.

Il est réconfortant de savoir que nous comptons aujourd’hui environ 762 diplômés des Centres du Rotary. Deux-tiers ont suivi le programme de Master tandis que le tiers restant a reçu le certificat. Certains d’entre eux ont très bien réussi et sont parvenus à des postes où ils peuvent avoir une influence sur le processus de paix. La plupart des diplômés du programme de Master ont entre 30 et 50 ans. Parmi les plus exemplaires, j’aimerais citer :

Cameron Chisholm (Université de Bradford, promotion 2008) est le président du International Peace & Security Institute (IPSI), une organisation destinée à autonomiser la prochaine génération d’artisans de la paix. Fondée sur l’idée que l’éducation peut atténuer la violence, IPSI facilite le transfert de connaissances et de compétences des dirigeants politiques, experts et praticiens vers un public le plus large possible. Cameron Chisholm est également professeur auxiliaire à George Washington University où il enseigne les « Théorie et pratique de la construction de la paix ».

Katia de Mello Dantas (Universités de Duke et de Caroline du Nord, promotion 2009) est directrice des politiques pour l’Amérique latine et la Caraïbes du Centres international pour les enfants disparus et exploités situé à Brasilia. Elle a été élue l’une des 99 professionnels de moins de 33 ans ayant le plus d’influence dans le monde par l’organisation Young Professionals in Foreign Policy.

Abdikheir Ahmed (Université du Queensland, promotion 2012) est le directeur exécutif de l’Immigrant and Refugee Community Organization of Manitoba (IRCOM), une organisation qui fournit des logements de transition et des services sociaux aux réfugiés nouvellement arrivés au Canada. Il travaillait déjà pour cette organisation lorsqu’il a obtenu sa bourse et son diplôme lui a permis de gravir des échelons à son retour.

Paivi Nikander (Université de Chulalongkorn, session de juin 2012) est adjointe du chef de mission de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe basée au Kosovo. Elle a obtenu cette promotion après avoir suivi le programme de Chulalongkorn.

Il faut espérer que d’autres leur emboîteront le pas. Ma vision pour ce programme était de former les généraux d’une armée de paix. Ils peuvent être issus de toute profession, mais dès qu’ils occuperont des postes de décideurs ils devront pouvoir influencer les efforts de construction de la paix dans leur communauté et si possible dans leur pays ou région ou même dans le monde. Bien entendu, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que tous les diplômés deviennent des généraux. Beaucoup ne seront que des soldats, mais nous avons également besoin d’eux. Et si uniquement 10 % d’entre eux parviennent au sommet de la hiérarchie et influencent des politiques, cela sera déjà satisfaisant. À terme, je vois de nombreux diplômés des Centres devenir ministres, hauts fonctionnaires, premiers ministres ou présidents. Grâce aux connaissances qu’ils auront acquises, ils auront conscience de la valeur de la paix et posséderont les méthodes pour résoudre les conflits.

Archbishop Emeritus Desmond Tutu gives Arnoldas Pranckevicius, a 2002-04 Rotary World Peace Fellow, a pat on the back during a Rotary World Peace Symposium press conference. Photo by Monika Lozinska-Lee/Rotary Images

Selon moi, ce programme est la clé pour l’avenir du monde et celui du Rotary qui administre ce programme. Ces Centres donneront une nouvelle dimension au Rotary dont les bourses deviendront aussi connues que les bourses Rhodes ou Fulbright, si ce n’est pas plus. On peut remettre en question les montants consacrés à ce programme – cela en vaut-il la peine ? Je pense que oui. Quand un enfant naît, ses parents trouvent l’argent nécessaire pour répondre à ses besoins immédiats, mais ils commencent également à mettre de l’argent de côté pour s’assurer qu’il fasse des études et soit ainsi équipé pour affronter la vie et mener une existence heureuse et gratifiante.

Mon plus grand souhait est qu’un plus grand nombre de Rotary clubs s’intéressent à ce programme afin que le vivier de candidats s’élargisse. J’espère également que l’objet de ce programme ne se trouve jamais dilué ou détourné. Des changements devront sans doute être apportés à ce programme pour qu’il reste en phase avec le monde, mais j’espère que les Rotariens qui seront en charge ne perdront pas de vue le concept originel.